Une opinion publique structurée par l’écologisme.

L’urgence écologique était telle au début des années 2000 que j’avais pensé que l’existence d’un parti politique spécifiquement écolo était dépassé, tous les politiciens allaient devenir écolos. Je me suis trompé. Hollande-Macron même combat, on a continué au niveau gouvernemental la politique des petits pas, la vertitude de surface et surtout le business as usual. Même Nicolas Hulot(1) comme ministre de l’écologie n’a servi à rien ou presque. Dégoûté, il a démissionné fin août 2018.

Mais il y a eu un basculement de l’opinion publique particulièrement ressenti depuis deux ans avec les marches internationales des jeunes pour le climat. A ce moment-là, les parents, les grands-parents et les enseignants ont commencé à se sentir concernés. Un autre moment-clé a eu lieu en 2019 avec les épisodes caniculaires de l’été. Personne aujourd’hui ne peut plus se dire en désaccord avec l’objectif de préserver la planète ou celui de lutter contre le réchauffement climatique. En septembre 2019, l’enquête « Fractures sociales »(2) montrait que la protection de l’environnement était devenue la première préoccupation des Français interrogés (52 %), devant l’avenir du système social (48 %) et le pouvoir d’achat (43 %). Une première. D’où un nouveau positionnement politique. Une étude de Destin commun(3) s’est appuyée sur une enquête de l’Institut Kantar : 86 % des sondés veulent « agir pour les jeunes générations », 78 % estiment « penser souvent aux enjeux liés à l’environnement », 77 % y perçoivent une « opportunité pour créer de nouveaux emplois », 68 % considèrent que « la protection de l’environnement pourrait nous unir par-delà nos divisions », 66 % affirmant que « la plupart des gens ne prennent pas assez au sérieux le changement climatique ».

Cette irruption massive de l’écologie dans l’imaginaire des gens est prise dorénavant très au sérieux par les partis politiques. En France, les candidats aux élections municipales tombaient tous d’accord sur la végétalisation dans les villes, même s’ils affrontaient encore sur la place à donner aux éoliennes. Que dire alors de spécifique quand tous les candidats de tous bords se veulent écolos ? Quelle est la place d’un parti écologiste ? Elle se trouve bien au-delà de l’opposition droite/gauche, dans la radicalité écologique. On sait dorénavant qu’on ne peut pas avoir à la fois croissance économique et décroissance des émissions de gaz à effet de serre. Il faut montrer que les mesures à prendre ne vont pas faire plaisir aux Gilets jaunes, aux membres des services publics, aux retraités, aux travailleurs dans les secteurs anti-écologiques, à ceux qui gagnent beaucoup trop…, mais qu’elles sont incontournables. La Coopérative pourrait être le lieu de cette radicalité, l’avenir nous le dira !

Michel Sourrouille

Coopérateur EELV

Poitou-Charentes

(1) Voir mon ouvrage : « Nicolas Hulot, la brûlure du pouvoir » (octobre 2018). En complément, voir aussi « L’écologie à l’épreuve du pouvoir » ouvrage paru en juillet 2016, dont je suis aussi l’auteur.

(2) « Fractures françaises » : un pays pessimiste sur son avenir et sceptique sur ses dirigeants, Le Monde, 16 septembre 2019.

(3) https://www.destincommun.fr/media/h10falb5/destin-commun-reconcilier-les-francais-grace-a-l-environnement.pdf.

3 réflexions au sujet de “Une opinion publique structurée par l’écologisme.

  1. Réponse de Patrick Salez à l’article de Michel Sourrouille
    Sans remettre en cause l’intérêt de cet article, je tiens à y apporter trois bémols :
    1) la radicalité écologique est par nature de gauche ;
    2) on ne sait pas dorénavant qu’on ne peut pas avoir à la fois croissance économique et décroissance des émissions de GES : on le sait depuis longtemps ;
    3) je suis en désaccord avec le fait que « les mesures à prendre ne vont pas plaire aux Gilets jaunes » : tout d’abord, les Gilets jaunes ont évolué sur la question écologique ; ensuite, une écologie radicale a justement vocation à corriger, par la répartition de l’impôt et par un traitement adapté de la précarité énergétique, les effets pervers de la transition écologique sur les catégories sociales les plus exposées.
    P.S.

  2. « la radicalité écologique est par nature de gauche » ?
    On aimerait que ce soit vrai mais je crains qu’il ne soit plus possible de raisonner ainsi.
    1) Etre de gauche n’est pas un absolu substantiel, c’est un positionnement historique ou contemporain
    2) Or la crise actuelle et les crises à venir vont malheureusement bouleverser ces repères et je ne parle pas ici de la radicalité écologique autoritaire et d’extrême droite qui est minoritaire (voir http://cqfd-journal.org/A-l-extreme-droite-l-ecologie) mais bien de celle que le traitement algorithmique de nos données personnelles va permettre et permet déjà en Chine ou en Corée.

  3. 1) la radicalité écologique est par nature de gauche

    Mouaiss, pour moi elle est libertaire

    La vision peut être commune avec la gauche dans sa dimension sociale mais l’approche est opposée.

    La gauche à tendance (ce n’est pas dans ses gênes) à être systémique pour aller à l’individu alors que l’approche libertaire va de l’individu pour aller au systémique (c’est dans ses gênes) ; et les compatibilités ne sont pas du tout facile.

    La gauche peut être collective mais elle est rarement coopérative.

    La gauche conçoit une interdépendance systémique, et là les tenants de l »écologie écosystémique se régale, le danger est l’autoritarisme et la dictature inéluctable qui est inné au fonctionnement de tous systèmes, son avenir ne peut être au mieux que des démocratures. Il n’y a pas d’espoir individuel

    L’écologie libertaire, elle, conçoit une interdépendance humaine, plus risqué et moins rassurante mais réellement naturelle, l’entraide est une autre loi de la jungle ; le danger vient au moment ou elle n’est que clanique, tribale, individualiste. elle peut mener à des confinements et à des affrontements, mais aussi elle peut-être être un monde équilibré si on sait la rendre sociétale. Il y a donc un espoir.individuel

    Christian

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