L’Éducation nationale en charge de l’instruction publique est organisée pour répondre à des situations globales et courantes. Par contre, elle a des difficultés à prendre en compte les situations « marginales ». Elle ne voit pas malheureusement ces « écarts » comme une nécessité pour elle d’un engagement solidaire, qui de plus devrait être facteur d’enrichissement, mais comme une situation « anormale ». Et pourtant, même si l’Éducation nationale n’est pas attachée directement aux pouvoirs régaliens de l’État, éduquer l’ensemble de la population constitue la base de l’acte de gouverner et les conditions de sa possibilité de santé démocratique.
Pour couvrir ce champ de « marginalité », elle a donc créé un secteur hors contrat (hors-sa-loi) pour les collectifs ainsi que la possibilité d’instruction dans la famille, ce qui n’est que la même réponse, hors contrat, pour les situations individuelles. Ce secteur est dédié à l’accueil d’un public pour qui le cadre général d’acquisition des connaissances n’est pas adapté (situation de handicap, intelligence et besoin différent, besoin d’émancipation plus rapide, sociabilisation demandant un suivi particulier, lieu d’habitation nomade ou difficile d’accès etc.) En résumé, tous les accidents ou écarts de la vie.
En dehors du CNED, et de quelques autres facilités, elle ne voit pas son intervention comme une solidarité et une possibilité d’enrichissement mais comme une situation marginale qu’elle exclut de fait de l’instruction publique. Elle passe ainsi à côté des apports fondamentaux d’une diversité d’approches et ne prend pas vraiment la peine d’en tirer des applications dans ses méthodes et principes éducatifs. Elle intervient principalement pour contrôler et vérifier que l’acquisition des connaissances est bien réelle et se passe dans de bonnes conditions. Cela est bien sûr essentiel à partir du moment où l’instruction est obligatoire, mais elle ne valorise pas des situations qui sont pourtant dans leurs recherches de solutions aussi nécessaires que la recherche fondamentale est nécessaire à la recherche appliquée.
Nous devrions donc favoriser par tous les moyens ce secteur qui dispose déjà d’un encadrement et d’un contrôle bien défini Par exemple, pour l’instruction dans les familles : https://www.education.gouv.fr/bo/12/Hebdo3/MENE1135458C.htm?fbclid=IwAR14uBxG992VQ1GOqXH33aAQV-ROs-xewvSYC3jAqZjPs3rAzDSvYs_9LCI
Par contre, je ne vois pas l’intérêt collectif et citoyen de favoriser le développement d’une école privée sous contrat, calquée sur l’éducation nationale. Cela n’apporte rien et ne fait qu’installer une sorte de compétition qui à terme va détruire l’Éducation nationale en installant des critères de fonctionnement inhumain. Les enseignants s’en plaignent, subissant déjà l’envahissement de cadrages administratifs. Nous avons déjà l’exemple des destructions qu’ont pu amener le développement d’un secteur privé calqué sur le secteur public avec les hôpitaux et les cliniques ; la tarification à l’acte et la primauté administrative ont détruit en retour l’humanité et la richesse de l’hôpital.
Nous ne savons pas quel sera l’État de demain et de fait, nous ne savons pas quelles sont les idées qui seront portées et celle qui seront proscrites.
Défendre l’école publique laïque et gratuite n’est pas incohérent avec l’idée de défendre une liberté d’enseignement qui s’enrichit par des solidarités.
Actuellement, le secteur sous contrat dispose d’un budget de 20 % du budget global de l’Éducation nationale que l’on pourrait abonder éventuellement avec les budgets existants d’opérations exceptionnelles essayant de prendre en charge des missions que l’Éducation nationale ne sait pas ou ne peut pas gérer. Ce budget devrait être figé et réaffecté à un nouveau secteur hors contrat redéfini, englobant toutes actions éducatives reconnues en dehors du secteur public. Les écoles sous contrat qui changeraient ainsi de statut devant démontrer, de la même manière que les autres démarches, quels projets pédagogiques particuliers elles veulent porter.
Ce secteur hors contrat serait organisé et suivi par un organisme « paritaire », composé de représentants de ce secteur, de représentants de l’instruction publique et de représentants des collectivités publiques. Cette organisation prendrait comme modèle les autres secteurs de solidarité, en s’inspirant de ceux-ci, assurance maladie, chômage, retraite, dont le fonctionnement est « garanti » par l’État.
L’éducation à la maison ne se trouve donc n’être qu’un épiphénomène, à mon avis mal évalué par le gouvernement, du problème général du traitement absolument nécessaire des marges des missions de l’éducation publique.
Christian Olive,
Coopérateur EELV
Languedoc-Roussillon
https://www.lunion.fr/id195122/article/2020-10-02/separatismes-les-ecoles-hors-contrat-et-linstruction-domicile-dans-le-viseur
https://www.liberation.fr/france/2020/12/03/la-scolarisation-obligatoire-est-elle-constitutionnellement-possible_1807547?fbclid=IwAR1d2Dd-TM9EZl1y2iCvl0NeChcf18LyF3IG0WBpxnMFaha5lHrmt3m3Xl4