Quel avenir pour le Réseau coopératif au sein d’EELV ?

A l’heure des réflexions sur la « réinvention » du Mouvement EELV dans la perspective du prochain congrès, il convient de s’interroger sur l’avenir du Réseau coopératif (ou « coopérative »). Des voix se font entendre, au sein du Parti comme de la Coopérative, en faveur d’une autonomisation de celle-ci et donc de son exclusion du mouvement.

Je défends personnellement l’option contraire : une Coopérative rénovée au sein d’un Mouvement rénové dans une forte complémentarité entre Parti et Coopérative, avec une place importante pour l’Agora. Cette option pourrait constituer un modèle « gagnant-gagnant-gagnant ».

A l’inverse, exclure le Réseau coopératif du Mouvement EELV reviendrait à commettre une erreur pour le Parti, pour la Coopérative et pour l’Agora.

Pour le Parti.

Ce serait un double manque d’ambition :

  1. par rapport aux attentes citoyennes :
  • profond rejet des décideurs politiques et donc de la « forme parti » qui leur sert de machinerie électorale,
  • appels à une autre façon de faire de la politique ;
  1. par rapport au formidable déploiement de la mouvance sociale exigeant des réponses aux urgences (climatique, sociale et démocratique).

Cette double ambition impose aux partis de dépasser la logique classique du recrutement pour les élections, pour s’adonner également à l’animation politique au sens large : dialoguer, former et transmettre, convaincre, mobiliser. Comment établir cette connexion et ce dialogue permanent avec la mouvance sociale, comment assurer cette animation politique sans le relai, sans le « pont » de la coopérative ?

Pour la Coopérative.

Elle a la capacité d’assurer un dialogue permanent et des relations solides avec la mouvance sociale, en particulier à travers sa participation aux initiatives et actions citoyennes au niveau local.

Elle a également la capacité (et le temps) d’assurer la formation théorique et pratique à l’écologie. Je songe par exemple à la demande de pédagogie exprimée le 23 juillet devant l’Assemblée nationale par les représentants de « Youth for Climate » réunis autour de Greta Thunberg : qui, mieux que la coopérative peut remplir ce rôle ?

Une autre de ses missions serait la diffusion d’un référentiel de l’ensemble des initiatives écologiques locales (ZAD, manifestations collectives, désobéissance civile, etc.), permettant de les relier entre elles afin qu’elles échangent leurs pratiques. Il y a un nécessaire espace de médiation entre le Parti et les citoyens qui se reconnaissent dans la culture écologiste sans en posséder tous les codes : la Coopérative devrait assurer ce rôle au sein du Mouvement EELV. Je dis « au sein du Mouvement », car la majorité des coopérateurs/trices apprécient, il me semble, cette complémentarité entre coopérative et parti, et une grande partie d’entre eux/elles ont choisi cette coopérative (plutôt qu’Utopia ou parallèlement à Utopia, par exemple) parce qu’ils/elles ont besoin du débouché politique qu’offre le parti, parce qu’ils/elles croient à une portée politique de leurs actions.

L’ouverture de la Coopérative aux citoyens et à la mouvance sociale se ferait au niveau local, soit par le biais de Maisons coopératives locales (donc internes), soit sous convention de partenariat avec des Maisons de l’écologie. Ne privons pas le mouvement EELV de l’ensemble de ces missions que la Coopérative a une vocation naturelle à assurer !

Pour l’Agora.

L’Agora, dont bon nombre de membres du Parti ignorent même l’existence, a pourtant un rôle précisé dans les statuts. Elle effectue aujourd’hui une expérimentation intéressante de rapprochement de deux cultures très différentes (Parti et Coopérative) et son travail de réflexion et de concertation sur la « réinvention » du mouvement est assez représentatif de ce que pourraient être ses futures missions.

Elle cumulerait trois fonctions :

  1. être un laboratoire de confrontation d’idées (enfin un vrai lieu de réflexion collective) ;
  2. être un lieu de co-construction de la ligne et des orientations politiques du mouvement ;
  3. être un lieu d’élaboration d’un langage commun de la social-écologie.

Elle s’appuierait, pour ce faire, sur deux piliers :

  1. l’animation des commissions, révisées de façon à devenir systémiques par grand sujet (incluant des sous-commissions thématiques chaque fois que nécessaire) ;
  2. l’accueil d’un groupe consultatif, ouvert aux autres organisations écologistes.

Une pensée de l’écologie politique, longuement débattue et mûrie, pourrait ainsi nourrir les pratiques des militant(e)s du Parti, des coopérateurs/trices et infuser progressivement dans la société. La clarification de la ligne politique du Mouvement aurait, en outre, tout à y gagner. L’Agora apporterait donc une valeur ajoutée au Mouvement en créant une synergie à partir de sa mixité culturelle et, plus encore, à partir des deux visions complémentaires de la pratique politique que portent respectivement le Parti et la Coopérative.

Patrick Salez

Coopérateur EELV

Poitou-Charentes

Une réflexion au sujet de “Quel avenir pour le Réseau coopératif au sein d’EELV ?

  1. Je suis d’accord avec cet objectif de dialogue et complémentarité. Voici pourquoi :

    1° ) Il serait dommage de se passer de reflexions et analyses de pratiques souvent approfondies par militants et élus EELV. Pour moi le risque de mener une pratique ( partielle) de » tabula rasa » serait contreproductif, gaspilleur de ressources, voire destructeur.

    -2°) Ceci dit, le militantisme passionné a aussi ses propres limites, si l’ on ne met pas en place des procédes de discussion qui permettent la prise de recul, la remise en question en fonction des avancées scientifiques, et des procedes coopératifs ainsi qu’une écoute non violente .
    Dans un groupe humain un peu important (j’ai bp pratiqué de groupes militants) , ce sont toujours les plus radicaux qui emportent le morceau, surtout si l’on décide à chaud. C’est « normal » et étudié en psychologie sociale.
    Par ailleurs l’appréciation de l’ avancée d’ une situation , d’une négociation, pose la question sur laquelle les Verts se sont toujours empoignés, qui est celle du « verre à moitié vide ou à moitié plein ».
    Cette question devrait être traitée plus pragmatiquement : on expérimente, on voit ce qui a effectivement produit de réelles avancées, en fonction de l’importance d’un sujet d’interet public. (C’est delicat car il difficile d’avoir une appréciation objective y compris incluant par ex l’évolution des idées et pratiques des adversaires )…

    Marie Odile Novelli
    http://www.monovelli.net 0762733926

    Conseillère municipale de Meylan (AIMeylan.fr)
    Membre du comité national Logement de la Fondation de France (www.fondationdefrance.org)
    Administratrice de Labo-cités : http://www.labo-cites.org/,
    et de l’association les Verts de Meylan http://vertsdemeylan.xyz/.

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