Que dire quand on est écolo à l’approche de Noël ? De la sobriété, de la sobriété et encore plus de sobriété, le plus possible heureuse. Mais pour porter ce message, il ne faut pas trop attendre de l’écologie institutionnelle, accaparée par l’organisation de diverses élections ou le soutien aux grévistes du 5 décembre. Même le mensuel La Décroissance, trop occupé à fêter ses 20 ans, ne dit pas un mot de la gabegie des fêtes de Noël dans son dernier numéro*. Fin 2005, des mouvements catholiques avaient bien lancé un appel : Vivre Noël autrement. Ils avaient diffusé une affichette avec le slogan : « Noël, bonne nouvelle pour la Terre », puisque « Jésus nous offre un monde nouveau, sans caddies pleins de cadeaux qui comblent les armoires et les décharges ». Les tracts invitaient à consommer moins et à se rapprocher de ses voisins avec lesquels la fête sera plus belle encore sans faire des kilomètres inutiles avec sa voiture, en offrant un peu de temps, un sourire, une oreille attentive, en inventant des gestes qui contribuent à sauver l’air, la terre, la mer, les forêts. Ce mouvement est resté confidentiel, il est même tombé en léthargie. Reste donc la grande foire commerciale qu’est devenu Noël, l’occasion pour chaque Français de dépenser quelque 570 euros en moyenne avec des enfants sur-gâtés et des cadeaux qui seront revendus sur le Bon coin. Apothéose consumériste annuelle sans contradiction possible ? Pas sûr !
Je remarque un tournant dans les médias vers un Noël plus responsable. Prenons un journal pas spécialement écolo, Le Monde**. Du repas de fête aux cadeaux en passant par la déco, on nous donne de multiples conseils. Pas de sapins artificiels, l’empreinte écologique est désastreuse, comptez 48,3 kg de CO2 contre 3,1 kg pour un arbre naturel. A ce rythme, il faudrait conserver son sapin en plastique plus de 15 ans pour amortir son bilan carbone. Pour la déco, avant de courir acheter de nouvelles boules et guirlandes, sortez du grenier une guirlande un peu déplumée, un Père Noël de guingois, et on répare ce qui est cassé au lieu de remplacer. Pour le repas, donner aux convives quelques boîtes alimentaires en carton afin qu’ils repartent avec les inévitables restes. Pas de produits carnés en entrée, 75 g seulement de viande ou poisson par personne avec un bel accompagnement de légumes. Le plastique est à bannir, privilégiez les jouets en bois et les productions artisanales locales. Privilégiez le train à la voiture et à l’avion, résistez à la tentation d’aller retrouver le soleil à l’autre bout de la planète. Etc., etc.
Je dirais bien dans ce contexte médiatique qu’il n’y a plus besoin de partis écolos. Les menaces qui pèsent sur notre avenir sont suffisamment intenses et reconnues par différentes études pour que l’opinion publique, via les médias, intériorise la nécessité d’une sobriété partagée. Mais il faut reconnaître que les différents partis sont loin d’être devenus écolos. En conséquence, les élections ont besoin de la présence d’un parti spécifiquement écolo. Avec quel discours ? Le nouveau secrétaire national du parti EELV, Julien Bayou, exprime dans Mediapart l’idée d’un « dépassement » d’EELV. Le contour reste flou, « cristalliser un troisième pôle entre Macron et Le Pen ». On en reste à la politique politicienne, le nécessaire changement de comportement n’est évoqué qu’à la marge par Julien Bayou : « Pour sauver le climat, nous devons tout repenser, et tout changer dans nos manières de produire, consommer, nous déplacer, habiter nos villes, en sortant du règne de la marchandise et de la croissance ». D’accord, mais cela reste très superficiel. Que pense l’écologie politique de la fête consumériste de Noël ?
Michel Sourrouille
Coopérateur EELV
Poitou-Charentes
* numéro spécial décembre 2019-janvier 2020.
** Le Monde du 2 décembre 2019, « Sapins certifiés, boules en bois et cadeaux immatériels :: des idées pour un Noël (plus) écolo ».