Depuis bientôt 50 ans les alertes sur la catastrophe écologique en cours se succèdent à chaque fois plus alarmantes, et comme l’origine de ce désastre semblait venir de la gestion politique de nos pays, il est devenu logique de fonder un parti prônant une action politique pour corriger ces dérives. Il fallait faire de l’écologie politique, c’est-à-dire utiliser l’argument écologique pour agir politiquement.
Changer les règles
Sauf que la cause première est démographique et économique, et la politique s’étant mise au service de l’économie en se justifiant par une défense de l’emploi donc du productivisme et de la consommation, des gens plein d’idéaux ont voulu utiliser l’écologie pour se placer en politique, espérant pouvoir corriger les grandes orientations.
Mais le green washing et l’effet de mode ont laissé la place à ceux qui voulaient avant tout la prendre, et non à ceux qui voulaient changer les règles.
Aujourd’hui tout le monde parle d’écologie ou plutôt d’environnement, la défense des paysages, des fleurs, la lutte contre la pollution ou le CO² et se garde bien de faire de l’écologie réelle affublée du sobriquet de punitive.
Le parti EELV lui-même se divise par de grandes engueulades entres les diverses stratégies possibles, chacun se jugeant légitime pour parler au nom de tous. Une déliquescence interne apparaît car l’idée d’écologie politique aboutit à ne pas changer les règles de l’action politique pour juste tenter d’y introduire un peu d’écologie.
Mais l’écologie est une science qui nous démontre comment depuis la nuit des temps des espèces extrêmement différentes ont réussi à toutes survivre ensembles dans un monde finalement plutôt réussi quand l’homme ne le transforme pas en poubelle.
La notion d’écologie politique est morte et le parti qui la soutient meurt avec elle, il ne faut pas construire une logique d’accession aux postes de responsabilités en s’aidant des idées, il faut d’abord construire des idées desquelles se déduiront les décisions politiques.
Remplaçons l‘écologie politique (utiliser l’écologie pour tenter de se placer en politique) par une politique écologique (construire une action politique fondée sur les lois de l’écologie).
Quelles sont ces lois ?
· La première est la recherche de diversité maximale, l’exact inverse d’un parti politique qui veut fusionner sous un même chapeau.
· La seconde est l’existence permanente de prédateurs, donc de contre pouvoir, qui conduit à une recherche permanente de l’équilibre.
· La troisième est la limitation de territoire, aucun animal ne possède plus que ce dont il a besoin en fonction de ses compétences,
· La quatrième est la notion d’écosystème, une logique locale construisant des ensembles équilibrés, dans une logique globale d’échanges où chacun même ceux qui nous paraissent les pires ont leur rôle,
· et d’autres lois encore, etc.
Refusons le dictat d’un militantisme univoque
EELV est constitué d’un parti dont la vocation primordiale est électorale, militant pour l’écologie politique, redoutant toutes divisions et trahisons, et d’une coopérative, travaillant sur d’autres logiques directement issues de la connaissance des processus écologiques, rassemblant des gens différents, expérimentant d’autres façons de s’organiser, ne s’occupant pas de recherche électorale puisque le modèle proposé est incompatible envers les notions fondamentales de l’écologie, imaginant justement d’autres modèles de décisions, refusant de se soumettre au dictat d’un militantisme univoque.
Ceux qui militent pour gagner des élections méprisent et considèrent les coopérateurs comme des militants de seconde zone qui n’oseraient pas s’engager, juste des sympathisants dont il faudrait même se méfier car venant d’ailleurs ils pourraient saborder leurs stratégies électorales soigneusement élaborées.
Si le mouvement EELV veut survivre et atteindre ses objectifs qui est de construire un monde écologique, il faut que l‘essentiel des acteurs soient les coopérateurs, construisant de nouvelles pratiques politiques économiques et sociales, transmettant autant que possible leurs réflexions forcément multiples et discordantes, ne considérant pas les conflits comme des faiblesses, mais comme des richesses. Et c’est issu de ce remue méninges, que pourra être initiée une action politique électorale qui aura des bases autrement plus solides contrairement aux luttes d’égo ou des stratégies actuellement constatées.
Faisons d’abord de l’écologie et la politique suivra !
Alain Persat
Sur le fond : ayant fait beaucoup de biologie des écosystèmes et agrosystèmes depuis un demi-siècle et ayant bien cotoyé le personnel politique, dont les Verts, je partage à 100%, merci de le dire si bien !
Sur la forme : le titre m’a fait tiquer avec son « dictât », dont l’accent circonflexe suppose l’existence d’un « S » alors que le mot vient de l’allemand « Diktat » ( traduire par « dictée », toujours pas de « S » en vue).
A été créé récemment (inconnu dans mon Littré de 2004 ) le mot français « dictat », peut-être pour ne pas froisser nos amis allemands, mais on a le droit d’utiliser sans rancune le mot allemand « Diktat » avec un D majuscule, ce qui permet d’accentuer à l’oral la syllabe « tat », grâce à l’accentuation tonique bien connue des germanophones.