Croissance exponentielle, un défi cognitif.

Une croissance exponentielle se produit quand une quantité augmente d’autant plus vite qu’elle est déjà grande. C’est le cas par exemple du nombre de malades infectés par le coronavirus. En France, il double en moyenne tous les quatre jours. Au bout de huit jours, ce nombre est multiplié par quatre, au bout de 24 jours, il est multiplié par 64 et par 256 après un mois. Donc rapidement, on obtient des nombres faramineux. Un nombre de nouvelles infections qui double tous les quatre jours signifie que la moitié des personnes infectées depuis le début de l’épidémie l’ont été depuis moins de quatre jours ! Ce phénomène d’emballement est donc difficile à appréhender, le modèle linéaire d’évolution de l’épidémie restant une référence du commun des mortels. Ce biais cognitif a d’ailleurs eu un impact sur l’adhésion (difficile) aux mesures de distanciation physique.

La rapidité du réchauffement climatique constitue pour la Terre ce que la pandémie est pour l’humanité : un bouleversement brutal, qui peut très vite échapper à tout contrôle. Cette fois, l’élément perturbateur n’est pas un virus, mais l’espèce humaine, en particulier sa fraction vivant à l’occidentale. L’action humaine sur la Terre a un temps de doublement de l’ordre de 40 ans, qu’il s’agisse de notre emprise sur les minéraux, sur les ressources énergétiques, sur la biodiversité ou sur la pollution. L’ennui pour la Terre, c’est que cette échelle est extrêmement courte : les systèmes vivants, les écosystèmes, sans parler de la géologie, ont des échelles de temps évolutives qui sont plutôt de l’ordre de cent mille à un million d’années. Autrement dit, le parallèle entre la fulgurance de l’épidémie de Covid19 pour l’humanité et la fulgurance du changement climatique pour la planète paraît quasi-parfait, et il doit nous aider à prendre conscience de l’urgence qu’il y a à agir. Pour un écologiste averti, le mirage des exponentielles n’est pas une découverte. C’est ce mécanisme qui avait été mis en évidence par le rapport de 1972 sur les limites de la croissance. L’évolution trop rapide de la population humaine, de l’emprise agricole, de l’industrialisation, du pillage des ressources naturelles et des pollutions nous mène au désastre. C’est ce même mécanisme qu’avait déjà mis en évidence Malthus en 1798 : la progression géométrique (exponentielle) de la démographie est en décalage croissant avec la progression arithmétique (linéaire) des ressources alimentaires. On ne peut sortir de ce dilemme qu’en maîtrisant la fécondité humaine.

Tout citoyen devrait comprendre ce que veut dire une exponentielle et en tirer les conclusions qui s’imposent : il est impératif d’agir politiquement de façon radicale afin d’instaurer une société post-croissance.

Michel Sourrouille

Coopérateur EELV

Poitou-Charentes

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