Cher Président,

Je vous le dis très sincèrement : je vous trouve ambitieux dans les annonces mais mollasson dans l’action.

Votre affichage est impeccable. Premier prix du Défenseur de la planète, Premier progressiste et grand sauveur de l’Europe (Angela a jeté l’éponge !), second plus long Débatteur populaire, talonnant Fidel Castro. Greta Thunberg, les milliers de jeunes scolaires belges, les marcheurs pour le climat, les requérants de « l’Affaire du siècle » contre le comportement climaticide de l’État français et les Gilets jaunes peuvent dormir tranquille : vous avez pris la mesure de l’urgence, la transition écologique et sociale est en marche et les processus délibératifs vont s’installer !

Votre pratique est moins reluisante. Report des fermetures de réacteurs nucléaires ; allègement de la taxe carbone pour calmer la fronde sociale ; confirmation du maintien de quelques centrales à charbon ; annonce du renoncement à la fin du glyphosate avant trois ans ; révision à la baisse des objectifs de réduction de la consommation d’énergie pour 2030 et projet de réhabilitation du diesel pour les véhicules récents, en parfaite négation des orientations européennes. Sur le terrain social, c’est « circulez, y a rien à voir ! » sur la taxation des gros salaires, comme sur le rétablissement de l’ISF. Quant à la démocratie, on quitte l’embourbement du RIC pour une désastreuse confusion chronologique entre un référendum sur l’organisation de l’État et l’élection de nos eurodéputés. Ah si, tout de même, je dois vous reconnaître de belles avancées dans le maniement du flashball et de la grenade de désencerclement.

À un tel degré, ce n’est plus la politique des « petits pas », c’est la grande régression généralisée. Devant de telles prouesses de cynisme politique, on se surprend à regretter la franchise d’un Nicolas Sarkozy avec son « L’environnement ça commence à bien faire ! » de 2011 ou la touchante naïveté d’un François Hollande et de son « Un ménage est riche à partir de 4000 euros par mois » de 2012.

Faut-il y voir les limites politiques du « En même temps » et du « Ni droite-ni gauche » ? Ou plus simplement la marque de votre soumission au pouvoir des lobbies ? Cette grande force obscure de la construction automobile, de l’énergie ou de l’agrochimie qui siège confortablement au MEDEF et que vous aimez rencontrer. Notez d’ailleurs que, dans ce domaine, nous sommes à la remorque de l’Europe et de son registre de transparence : avez-vous accès à l’agenda des rendez-vous de vos ministres ?

Allez, comme mon sens de l’urgence climatique et sociale l’emporte aujourd’hui sur mon positionnement politique, je vous refile un conseil d’expert qui tient en trois toutes petites décisions bénéfiques à la transition énergétique et aux dépenses contraintes des ménages.

1) Vous soustrayez les investissements écologiques du calcul du déficit public ;

2) Vous affectez la totalité du produit de la taxe carbone aux collectivités territoriales ;

3) Vous complétez la décentralisation qui, depuis les lois Defferre de 1982-1983, n’a pas vraiment progressé ; la décision énergétique passera ainsi au niveau du bloc communal et dans les mains des coopératives, où elle est la plus efficace ; tant pis pour EDF et Engie.

Et alors pour la tenue de votre prochain Grand Débat, je vous suggère la commune de Prats-de-Mollo-la-Preste dans les Pyrénées orientales. On y prépare l’autonomie énergétique en 2021. Quand vous serez là-bas, ouvrez grand vos oreilles et, ensuite, accompagnez la diffusion du modèle partout où il est applicable. Pour que l’énergie propre et solidaire soit notre avenir.

Merci pour votre écoute, mon Président.

Patrick Salez

Coopérateur EELV

Poitou-Charentes

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