Les chambres du temps

Les chambres du temps

Que subissons-nous ?

L’économie n’a plus pour objectif la satisfaction des intérêts de l’humain mais la pérennisation d’un système où l’individu n’est plus que le dernier maillon d’une chaîne de production répondant aux exigences d’une vision économique sans perspective pour tout un chacun. La conséquence d’une telle situation fait que cette économie n’a plus d’intérêt pour l’individu qui, malgré tout, est mis à contribution pour produire et consommer ; et tout cela sans exister en tant qu’être humain et sans pouvoir y inclure ses exigences d’existence.

En ce qui concerne le commun, il n’est plus collectif mais le résultat d’une appropriation par le monde politique, sous couvert de délégation, de la gestion de la chose public. Le commun s’est ainsi déconnecté des individus qui n’y voient plus, là non plus, leurs intérêts.

La politique, l’économie et la production par le travail sont donc devenues des domaines subis et ennuyeux qui empêchent de vivre ! …. et d’être une personne à part entière … Cela est devenu insupportable.

L’individu veut redevenir humain.

L’individu redécouvre qu’il a des besoins essentiels de survie et d’existence en tant qu’humain, qui sont son identité première, au-dessus de tout, et ressentis dans un intemporel terrestre. Le reste de ses intérêts, qui constitue la diversité de son désir individuel et collectif, est composé de convenances personnelles et agréments de vie, et tend à aboutir au « bonheur » ; il se comprend à partir d’un environnement, d’un lieu, d’un contexte et d’un temps dont la finitude existe mais qui n’est pas toujours facilement bornée. Cet ensemble de besoins et d’intérêts, qui va des exigences de l’humain à l’intérêt de l’individu, va aussi du temps court qui s’appuie sur une culture de l’immédiat proche, de ce que nous appelons la société civile, jusqu’à une culture du temps long, qui tient compte des besoins essentiels et des intérêts de tous, y compris de ceux des acteurs absents que sont la nature et les acteurs non contemporains.

Le temps modéré nécessaire à l’action, tenant compte de ces deux temps extrêmes, et qui en résulte, pratique l’arbitrage et a une visée calculée et réfléchie qui devrait se trouver portée par la modération politique.

L’importance du temps

Un des paramètres essentiels de l’identité d’un individu est sa perception du temps au moment ou il prend des décisions ; une vision d’un temps différent donnera des décisions différentes. Les désaccords sur un intérêt collectif trouvent souvent leur origine dans cette différence de perception temporelle, non exprimée et souvent implicite pour chacun. Sans accord sur le temps qui préside à une décision ou une orientation, une assemblée va subir l’impasse décisionnelle de la polémique liée à ces temps multiples… Aucun espoir de s’approcher d’un consensus n’émergeant, la violence du vote majoritaire s’impose.

L’intérêt collectif est constitué de temps multiples hétérogènes et même non linéaires. Par conséquent le bornage ou la définition du périmètre du temps est essentiel, primordial et indissociable d’une bonne représentation.

L’organisation des temps

Le champ de la modération politique doit montrer dans ses visées collectives à moyen terme qu’elle respecte le temps long de la survie et de l’existence et le temps court de l’intérêt individuel.

Pour que nos élus ne subissent plus un désordre schizophrénique, résultant de la prise en compte simultanée de temps différents conduisant à légiférer sur l’actualité ou à oublier les besoins essentiels, il semble important de revoir notre manière de décider collectivement en créant deux chambres politiques dédiées exclusivement l’une au temps long et l’autre au temps court, et en créant une articulation politique qui permette à chacune de ces chambres d’exister et de peser.

Aujourd’hui, la prise en compte du temps court nous apparaît principalement au travers des lobbys, des grèves sectorielles, de la désobéissance civile, et ceci, dans un contexte de rapport de forces. Une présence constructive et apaisée serait la bienvenue.

Cette expression du temps court est, aujourd’hui, souvent issue de syndicats ouvriers et patronaux liés au monde du travail et d’associations d’utilisateurs ou de consommateurs et de groupements citoyens… Il y a beaucoup d’oubliés, chômeurs, retraités, jeunes et aussi l’activité culturelle, l’activité sportive, l’activité cultuelle, l’activité de la formation, et puis le champ de la jeunesse, de l’art, de la connaissance, de l’émancipation, de l’égalité, des immigrés, des prisonniers, des militaires, etc. Cette chambre du temps court devrait les représenter tous et porter une parole contraignante : elle deviendrait une chambre des syndicats citoyens.

Pour la chambre du temps long, d’une certaine façon, l’inspiration est plus facile. Elle existe déjà sous une forme représentative restreinte d’assemblée consultative et devrait être améliorée, ses objectifs précisés et son rôle étendu. C’est Le Conseil économique, social et environnemental, dont le travail serait admis désormais comme fondamental et devrait être mieux pris en compte … C’est notre résilience qui est en jeu.

La chambre de la modération politique, à égalité avec les autres chambres, n’ayant plus comme objectif que la gestion du temps modéré, serait libérée de ce difficile papillonnement et écartèlement résultant de la prise en compte de tous les temps à la fois et aurait ainsi à sa disposition tous les garde-fous nécessaires provenant des deux autres chambres.

Dans cet organigramme, l’exécutif serait là exclusivement pour mettre en œuvre et faire le lien entre le corps de l’administration et les chambres politiques.

Trois manières différentes de participer au champ politique.

Cette participation se ferait au travers de la Chambre des syndicats citoyens et la Chambre économique sociale et environnementale, dont les représentations ne seront pas territoriales, et la Chambre de la modération politique qui bénéficiera d’une représentation territoriale.

La Chambre des syndicats citoyens pourrait être une refonte du Sénat. Nous avons vu que la Chambre économique, sociale et environnemental pouvait être issue d’une refonte du CESE actuel et la Chambre de la modération politique serait assez proche de ce qu’est l’assemblée nationale.

La coexistence de ces trois chambres, à l’identité marquée et contraignante, devrait éviter les conflits polémiques par le respect mutuel, qu’elles se porteront ou devront se porter, découlant de leur nécessité reconnue.

Christian OLIVE

Coopérateur EELV

Languedoc-Roussillon

 

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